Le dispositif scénique de LES DEUX VOYAGES DE SUZANNE W. s’appuie principalement sur la vidéo. Les spectateurs assistent en quelque sorte à un tournage en direct.
La scénographie représente de manière assez réaliste le garage de la fiction. Dans ce garage, autour de la voiture, un mini studio de tournage est installé : comme dans les trucages de cinéma archaïques, les paysages de ce road trip fantastique sont projetés sur les murs de parpaings. Ces paysages surréalistes défilant autour de la voiture sont filmés en direct par une caméra mobile installée sur un travelling. Le rendu de ces prises de vue (donnant l’impression donc que la voiture avance) est projeté sur un écran surplombant le garage et sous lequel joue le groupe de rock. Cet écran peut évoquer un drive-in ou un de ces panneaux publicitaires le long des autoroutes.
Les différents lieux de la fiction seront « reconstitués » dans l’espace unique du garage, grâce à la vidéo et à quelques accessoires « signes » : un lit pour les motels, un distributeur de boissons pour les stations-service ou une glissière de sécurité pour les bords de route…
Il ne s’agira pas de développer un jeu « pour » la caméra, mais au contraire de travailler une approche très formelle et presque chorégraphiée de la direction d’acteur en friction avec le dispositif.
Une première période de répétitions à la Ferme du Buisson nous a permis d’interroger plus précisément ce rapport à la caméra qu’induit le dispositif ainsi que la multiplication des points de vue qu’il propose.
Le caractère artificiel et presque naïf du trucage mis en place nous permet de créer à l’écran des images à la fois ludiques et oniriques, bricolées et pourtant puissamment évocatrices.
Ainsi, la voiture pourra rouler au milieu d’un paysage de flammes ou s’enfoncer dans l’océan, se remplissant d’eau et donnant à voir le corps flottant de la femme…