Billetterie

Le théâtre en Allemagne

Le Dernier Feu

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Nulle part en Europe le paysage des écritures dramatiques contemporaines n’est plus dynamique et varié que dans les pays de langue allemande, pour des raisons à la fois historiques et structurelles. Depuis la fin du XVIIIe siècle, le théâtre participe au mouvement d’émancipation populaire, et chaque génération voit naître des auteurs en prise directe avec les problèmes de leur temps, et capables d’interroger les formes les plus à même d’en rendre compte. De Lessing à Jelinek, en passant par Wedekind, Brecht, Bernhard ou Fassbinder, la liste est longue des noms qui ont franchi les frontières. Mais l’avènement et le succès de ces auteurs tiennent aussi à la façon dont l’institution théâtrale fonctionne dans les pays de langue allemande, c’est-à-dire selon un principe de troupe et d’alternance dans la programmation. Les tournées étant rares, une même pièce, y compris contemporaine, peut être montée dans plusieurs Théâtres simultanément au cours de la même saison; le « marché » existant, il encourage les auteurs à écrire.
 
Le système de promotion des textes est lui aussi rodé. Il existe plus de 40 éditeurs/agents (Les Verlags) qui gèrent directement les droits de « leurs » auteurs, et qui sont en liens permanents avec les bureaux de dramaturgie des théâtres. La chaîne est ainsi complète et le chemin à parcourir de l’auteur au metteur en scène, puis au plateau, repérable.
 
La réunification de l’Allemagne, au début des années 90, a vu apparaître une génération qui, à l’instar de Dea Loher, de Marius von Mayenburg ou de Roland Schimmelpfennig, eut la chance de suivre de nouvelles et ambitieuses formations « d’écriture scénique », notamment à l’Université des Beaux-Arts de Berlin, dans un pays où la société civile vivait un bouleversement politique et social majeur. Le Berlin des années 90 interrogeait une nouvelle fois, de façon immédiate, le rôle de miroir du théâtre dans la vie quotidienne, et les auteurs prirent à bras le corps les questions nées de ces bouleversements, où se mêlaient étroitement l’intime et le public. C’est à cette époque que se consolidèrent des compagnonnages tels ceux de Dea Loher avec le metteur en scène Andreas Kriegenburg ou encore Marius von Mayenburg avec Thomas Ostermeier.
 
 
– Laurent Muhleisen