Billetterie

Les Bonnes

13 octobre au 14 novembre
1992

Ce soir, dans la petite salle de l’ESPACE GO, la lumière va se lever sur du théâtre dans le théâtre. Des bouches des personnages sortira une langue somptueuse, plus difficile à libérer que l’alexandrin. Une langue splendide dont l’esthétique n’est pas innocente mais porteuse d’une morale, d’une exigence de vie. Des corps étroitement enserrés dans des vêtements dont tout, jusqu’à l’usage pathétique de petites jarretelles telles des tiges de lys fanées, vont nous dire : ce soir nous jouons LES BONNES de Jean Genet. Et quelque chose – de très ancien – et de résolument moderne va nous être présenté.
 
Toute femme de théâtre, tout homme de théâtre rêvent un jour de se mesurer à Genet. Parce que le théâtre de Genet replie le théâtre sur lui-même et le met à la recherche de son origine. Affronter Genet, jouer Genet, c’est à la fois puiser à même la mémoire fondatrice des tragédies grecques, à même la conscience vertigineuse et périlleuse de notre siècle. Le théâtre de Genet, c’est le Grand Miroir du Monde.
 
J’ai peur, non pas de la qualité de représentation. J’ai peur de Genet. Je sais pour l’avoir vu en salle de répétition que Genet exige l’envergure sans jamais l’attendre. Il l’impose avec un immense amour à ses personnages, il l’impose de manière implacable à la spectatrice que je suis.
 
J’envie René Richard, Diane, Adèle, Madame Lachapelle. Ce sont des artistes fabuleux. J’envie le courage de leur humilité. Je bénis leur générosité. Pour jouer LES BONNES, les actrices ont à nous livrer cette part d’elles-mêmes, qu’elles-mêmes, nous ou les autres jugeons inacceptable. Et pour cela, elles doivent atteindre le plus difficile : être actrice sans public. Puisque chaque mot est dit d’abord pour se l’entendre dire.
 
 
– Ginette Noiseux