Quand on marche sur le chemin du deuil, la destination n’est pas souvent évidente. Elle est en fait inexistante ou illusoire parce qu’il n’existe pas vraiment de fin en soi. Mais l’itinéraire comporte des escales et des points de vue d’où l’on peut observer l’horizon, prendre le pouls de notre traversée et parfois même en être ébloui. D’où je me trouve aujourd’hui, à cette halte routière offerte par l’ESPACE GO, je suis en mesure d’admirer le trajet parcouru. D’observer le passage éreintant de l’absence d’une figure paternelle dans ma vie et tout ce qu’elle m’a permis de sublimer.
J’admire aussi la mort, ce sommet que nous gravirons tous et toutes et qui m’a prodigué d’importants enseignements au cours des dernières années. Elle me paraît présentement comme une référence ultime, un acte de foi primitif et communautaire qu’on doit rétablir dans notre culture.
J’admire la main tendue d’Édith Patenaude qui m’a aidée à gravir le sentier avec confiance et liberté.
J’admire Marie-Ève Milot qui a accepté, pendant que tous ses sens brûlaient d’un grand deuil, de marcher sur cette route avec moi. De nous avoir menées à bon port avec intégrité et humanité.
J’admire toute l’équipe de création pour avoir contribué avec une grande sensibilité à cette recherche du sacré contemporain dans un contexte où beaucoup de nos repères ont disparu.
J’admire Marie-Claude St-Laurent, ma dramaturge et précieuse amie, pour la transmission de son savoir et le climat de sécurité qu’elle m’a offert dans le travail d’écriture, afin que je puisse me rendre ici ce soir.
J’admire la profondeur des rencontres que j’ai eues avec Cynthia J. Brunelle, la thanadoula qui a accompagné le projet.
J’admire la résilience de ma mère qui m’a accordé une transparence complète vis-à-vis de notre genèse familiale et le droit d’utiliser les artéfacts de son histoire d’amour révolue.
Je prends le temps aussi d’admirer au passage la femme et l’artiste que je deviens à travers l’enfantement de cette œuvre.
Enfin, je vous admire, vous, le public, ainsi que les deuils personnels et collectifs que vous portez. Trop souvent, ces deuils ne trouvent aucun lieu pour être entendus, ni reconnus. Sans vous, cet espace rituel n’existerait pas. Votre présence n’est pas banale. Elle est essentielle au déploiement de la pièce.
Je serai avec vous du début à la fin.
Bon spectacle !
Krystel Descary
Faire la mort : Mot de l’autrice
Faire la mort
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