Billetterie

Édith s’invite chez Gen et Mélo

24 septembre 2024

Avant chaque nouvelle production, notre directrice artistique se faufile chez les créatrices, au cœur même de leur foyer. Elle s’assoit avec elles un moment, profitant de l’excitation vers la première, mais aussi de sa relation privilégiée avec elles, pour discuter librement et vous offrir ces entretiens intimes – et quelques clichés indiscrets des recoins de leur maison.

 

 

ÉDITH
Mes chères, merci de m’accueillir chez vous.

On va parler du show, évidemment, mais déjà, je suis curieuse de savoir : je sais que vous êtes un couple dans la vie; comment la décision de créer ensemble s’est prise?

 

MÉLO
On a commencé à travailler ensemble à l’école.

 

ÉDITH
Vous étiez dans la même classe?

 

GEN
Oui, à Sainte-Thérèse. Et puis, on a fait un show weird ensemble.

 

MÉLO
Oh, c’était pas weird, c’était adorable. C’était un peu une prémisse de notre amour.

 

GEN
C’était un show pour enfants. Mais ça laissait clairement présager qu’on n’allait pas faire du théâtre pour enfants. Ha ha! C’était l’histoire de Socket et Chaussette, une paire de bas qui est jetée aux vidanges par Gaston le bûcheron. Il y avait des chansons qui disaient, genre : « tout ce qu’on a besoin, c’est d’être ensemble ».

 

ÉDITH
Haha! Mais là, avais-tu déjà un kick ?

 

GEN
Moi non. Mais l’affaire, c’est que je n’ai jamais cruisé les hétéros.

 

MÉLO
Consciemment.

 

GEN
Mais c’était vraiment ma meilleure amie. Ha ha!

 

ÉDITH
Que t’aimais beaucoup.

 

GEN
Je n’savais même pas que Mélo était toute troublée.

 

MÉLO
J’avais été dans une relation hétéro de six ans. Ça faisait un an que j’avais quitté cette personne-là. Et puis, je sais pas, j’avais les radars ouverts. Finalement, avec Geneviève, ça s’avérait être plus que de l’amitié. Pis je lui ai dit. Et j’ai pesé sur le gaz, c’était comme wouhahahaha!

 

GEN
Mélo était comme : bon ben, c’est ça que je suis. C’était merveilleux. Elle appelait toute sa famille et c’était réglé. C’était vraiment impressionnant. Moi, ça avait été le grand drame dans ma vie.

 

MÉLO
J’ai emménagé ici tout de suite. Tout est arrivé en même temps : le café (Gen et Mélo ont été propriétaires du café Reine Garçon pendant huit ans), la compagnie de théâtre, être colocs. On s’est dit : si ça pète, ça pète.

 

ÉDITH
Il y a de cela huit ans. Donc, la fondation de la compagnie est arrivée logiquement. Qu’est-ce qui a été votre premier projet?

 

GEN
On a fait plein d’affaires, mais tu sais, on avait le café. On travaillait 80 heures par semaine. Mais ça restait vraiment important de faire des shows.

 

MÉLO
Je me rappelle de dormir à côté du poêle ici pour faire cuire des patates pour le lendemain. C’était pas humain, on avait pas le temps d’acheter du shampoing. Mais on créait !

 

GEN
Mosca techno remix ! C’était ça, notre premier projet. C’était une performance sur le cycle de vie des mouches à fruits. C’était vraiment fortement inspiré de notre vie au café. Après, on a créé Stabat Pater.

 

MÉLO
C’était un show de marionnettes avec des Sentinelles de l’air. C’était sur le Parkinson de mon père.

 

ÉDITH
Oh, touchant.

 

MÉLO
On était beaucoup dans la forme qui vient nourrir le propos. Donc, on a fait le show de marionnettes pour traiter du Parkinson et, après, c’était Rock Bière : le documentaire.

 

GEN
Ouais. C’est à ce moment-là que Geoffrey [Gaquère] nous a fait confiance. Il est venu voir le show à feu Zone Homa, pis tout de suite après, il nous a demandé si on voulait le faire à Espace Libre.

 

ÉDITH
Bravo Geoffrey!

 

GEN
C’était vraiment hot !

 

ÉDITH
Il a eu du flair.

 

GEN
Je pense qu’il a bien fait de nous faire confiance. On était sold out les deux shows qu’on a faits là-bas, Rock Bière et Ciseaux.

 

ÉDITH
Mais en allant vers Rock Bière : le documentaire, est-ce que c’était le contenu qui déterminait la forme pour une première fois?

 

GEN
Attends, la raison pour laquelle on fait du drag, est-ce qu’on te l’a dite ?

 

ÉDITH
Non !

 

GEN
On voulait faire un show de théâtre documentaire sur pourquoi il n’y a pas de drag kings à Montréal.

 

ÉDITH
Parce qu’il n’y en a pas? Ben là, il y en a grâce à vous. Mais il n’y en avait pas?

 

GEN
En 2018, non. Y’en avait pas beaucoup dans le milieu francophone.

 

ÉDITH
Toute la pratique du drag a vraiment éclaté dans le monde, non? Grâce à Ru Paul entre autres?

 

GEN
Là, ça a explosé partout dans le monde. Là, il y en a. Du drag king aussi. On a voyagé et il y en a partout.

 

MÉLO
Mais c’est dans l’ombre quand même. Et Ru Paul, il n’veut pas de drag kings sur le show !

 

ÉDITH
Pourquoi ?

 

MÉLO
Misogynie ! C’est ça qu’on dénonce dans Rock Bière : le documentaire : c’est que la misogynie, elle existe même dans nos communautés. Il y a un dégoût du corps féminin. Il y a des insultes.

 

ÉDITH
Ah oui?

 

MÉLO
C’est terrible. Dans le monde du drag, il est beaucoup dit que ça prend un homme pour faire une vraie femme.

 

ÉDITH
Eh la, la. Mais comment c’est arrivé pour vous, le drag king? Vous vous êtes aperçu·es qu’il n’y en avait pas ou c’est en commençant à en faire que vous vous êtes dit : voyons, ça n’existe pas?

 

MÉLO
C’est Gen.

 

GEN
Ça faisait des années que j’étais obsédée. Je cherchais des drag kings.

 

ÉDITH
Ah oui ! Ça te tentait?

 

GEN
Je me disais : pourquoi il n’y a pas de drag kings, pourquoi il n’y a pas de drag kings?
Mélo, elle a un passé de maquilleuse de fantasy !

 

ÉDITH
Ha ha, pourquoi pas !

 

MÉLO
Tu m’engageras pour la fête de tes ados ! Mais c’est ça, Gen voulait pas faire un drag king. Pis moi non plus, je n’voulais pas.

 

ÉDITH
Tu voulais voir des drag kings, tu voulais que ça existe, mais tu n’voulais pas en faire.

 

GEN
Ben en fait, pour être bien honnête, je pense que j’avais vraiment la chienne de faire ça. Fait que j’étais comme : Mélo, vas-y, fais-le.

 

ÉDITH
Tu l’as lancée sous le train!

 

GEN
Je l’ai lancée sous le train, oui! Donc, c’était une compétition de douze semaines de drag. Et Rock Bière est né.

 

MÉLO
Mais on n’avait pas un costume, on n’avait pas de maquillage.

 

ÉDITH
Attendez. Donc, toutes les autres, c’est des drag queens? T’étais le seul drag king?

 

MÉLO
On était deux.

 

GEN
Chaque semaine, il y avait des défis. On n’était pas rémunérées. On avait des nouveaux numéros à créer. On n’a pas lâché.

 

MÉLO
Pis Rock Bière a gagné!

 

GEN
On a filmé plein d’affaires pour faire un documentaire autour de ça, l’ascension de Rock Bière, qui il est… Et aussi, on avait interviewé plein de monde. Ben, surtout des personnes AFAB (personnes assignées filles à la naissance) pour savoir comment elles se sentaient dans la communauté. C’est fou parce qu’elles ne voulaient pas parler.

 

MÉLO
Non, elles voulaient sauver leurs petits acquis; elles ne voulaient pas parler contre les bookers. Parce que ça les mettait dans la marde. Aujourd’hui, elles parlent plus. Elles prennent plus leur place. Elles sont plus des kings aussi.

 

ÉDITH
Mais la première fois que t’as fait du drag, comment ça s’est passé?

 

MÉLO
J’ai eu un blackout. Je l’ai fait, mais j’ai eu un blackout. Je suis arrivée sur scène, j’étais tellement stressée.

 

GEN
Le nombre de comédiennes qui blackoutent en faisant du drag king!

 

ÉDITH
Ah oui?

 

GEN
Oui, on en a initié beaucoup. On fait des formations, de la transmission. À chaque fois, c’est différent. Il y a quelque chose d’épeurant.

 

MÉLO
T’es toute seule, mais ça te transforme aussi. T’es comme : WOUA! C’est gênant aussi, l’espèce de malaise de la communauté francophone avec le changement de genre. On est beaucoup plus mal à l’aise avec la fluidité des genres que les anglos.

 

GEN
Je pense que dans la communauté théâtrale il y avait un regard négatif sur le fait qu’on faisait du drag. Je pense honnêtement que c’est de moins en moins comme ça. Mais ouais, il y avait un jugement.

 

ÉDITH
Vous avez été avant-gardistes. Vous le ressentez, qu’il y a un changement de perception?

 

GEN
Ben oui. On se fait demander de faire toutes les soirées-bénéfice de toutes les compagnies de théâtre.

 

MÉLO
Et avec plaisir !

 

ÉDITH
Après Rock Bière : le documentaire, vous avez créé Ciseaux. Est-ce que le projet est arrivé un peu comme Rock Bière, du manque? Du fait qu’il n’y avait pas d’information qui circulait sur l’histoire des combats lesbiens au Québec?

 

MÉLO
Geoffrey voulait encore booker Rock Bière : le documentaire, pis on lui a dit : ben non, on est game de créer un show en neuf mois. On était très inconscientes.

 

GEN
C’était cute. Au début, Ciseaux s’appelait Bière et métal. C’était weird. Et plus on poussait les sujets qui nous intéressaient, plus on se rendait compte que, dans le fond, on voulait encore parler de misogynie. C’est comme si on parle tout le temps de ça.

 

ÉDITH
Mais c’est intéressant que vous le disiez comme ça. On peut se dire que vous avez travaillé sur l’histoire des drag kings ou sur l’histoire des femmes lesbiennes au Québec, alors qu’en réalité c’est à propos de misogynie.

 

GEN
C’est à propos du fait que l’histoire a été racontée par les hommes gais. C’est plate, il n’y a aucune représentation de ces combats-là, des luttes lesbiennes. Je n’sais pas comment dire : elles se faisaient violer., mais c’est comme si ce n’était pas grave parce que c’étaient des femmes.

 

ÉDITH
C’est comme si ça ne se mélangeait pas, ces deux récits-là. Comment ça, donc?

 

MÉLO
Les femmes étaient beaucoup là pour prendre soin dans les luttes. Ça n’a pas été beaucoup valorisé non plus. Elles étaient là pour structurer et organiser.

 

GEN
Oui. Et après, avec Explosion, c’était encore plus évident. C’est tout le temps la misogynie, c’est fou. Pis même Moi, Jeanne, pour vrai, c’est à propos de misogynie.

 

ÉDITH
Vous le retrouvez dans Moi, Jeanne, ce même fil-là?

 

GEN
Complètement. En fait je me demande même si Moi, Jeanne, ça n’parle pas plus de misogynie que de transidentité.

 

ÉDITH
C’est mon sentiment. On en parle depuis le début, vous et moi, de ça, du fait que même si je ne vis pas de transidentité, le texte m’a frappé vraiment fort.

 

GEN
Mais oui! Les femmes peuvent se reconnaître là-dedans !

 

ÉDITH
Oui! En fait, c’est ça. Ça demeure une histoire d’émancipation et de droit d’être soi. Pour moi, ça s’adresse à tout le monde.

 

MÉLO
Et il y a aussi un discours très clair envers les personnes qui sont transexclusives, qui voient la non-binarité comme une menace. Cette identité-là ne vient pas mettre en danger la féminité.

 

ÉDITH
C’est vrai que c’est une chose délicate dans le monde féministe, la question de la transidentité ou de la non-binarité. J’ai l’impression que certaines féministes se disent que l’idée du féminisme était justement de donner le droit aux femmes d’être tout ce qu’elles veulent. Je pense que certaines féministes considèrent la non-binarité comme une sortie de secours.

 

GEN
Je n’pense pas qu’une personne non binaire a plus de privilèges. En fait, je pense que c’est le contraire. Mais ces premières féministes-là, elles se sont battues pour avoir le droit d’avorter, donc c’est sûr qu’elles se disent : maintenant qu’on a des acquis, peut-on arrêter de complexifier tout ça?

 

MÉLO
En même temps, dans les communautés queer, les lesbiennes, on pouvait se faire dire : ah, bientôt tu vas être non binaire, tu vas voir. Comme s’il y avait une hiérarchie. Il y a quand même quelque chose qui se passe avec la non-binarité.

 

GEN
Comme si c’était une découverte suprême. Ouais, comme si, si t’es pas rendu·e là, t’es pas…

 

ÉDITH
T’es pas vraiment éveillé·e. T’as pas eu l’illumination encore.

 

GEN
Ouais, ouais, exact.

 

MÉLO
Gen est chanceuse, elle a eu l’illumination. Moi j’attends encore ! Mais je suis très bien. Je sens que je suis une femme, mais je veux soutenir les personnes non binaires, je veux être avec iels, je veux vraiment lutter à leurs côtés.

 

ÉDITH
Sur la hiérarchie de l’identité, Moi, Jeanne est très fort, je trouve. Bien que le texte dise qu’être trans c’est sacré et magique, du moins, c’est peut-être dans l’interprétation que tu en fais ou que vous en faites. On ne le ressent pas du tout comme une hiérarchisation de ce qui est meilleur d’être.

 

GEN
Être femme, c’est fucking fantastique.

 

ÉDITH
Ouais, être homme, ça doit être fantastique aussi. Ou peut-être moins ces jours-ci…

 

GEN
C’est fou parce qu’en lisant le prologue, tu sais, on capotait.

 

ÉDITH
Qu’est-ce que tu veux dire?

 

GEN
La première fois qu’on l’a lu, on capotait, on avait les larmes aux yeux. On était dans un café à Berlin. On était comme : crisse, c’est tellement bon. On sentait qu’on aurait pu écrire ça.

 

ÉDITH
C’est que ça résonnait pile-poil sur ce vous aviez envie d’exprimer.

 

GEN
Oui! Après, même l’idée de faire une Jeanne d’Arc non binaire, on aurait pu l’écrire nous-mêmes. Et juste le fait qu’il y a des monologues adressés au public, c’est très Pleurer Dans’ Douche. Et la prise de parole est quand même audacieuse. On a quand même coupé des affaires qui allaient trop loin selon nous.

 

ÉDITH
C’est parce que ça allait trop loin que ça a été coupé ou parce que ça avait déjà été dit?

 

GEN
Ah non, il y a des affaires qui allaient trop loin. Qui attaquaient vraiment les hommes. C’est ça qu’on essaye de faire depuis qu’on fait du drag king. On essaie d’être douces dans notre façon d’éduquer les gens.

 

ÉDITH
Dans le texte, je vois de quoi tu parles. Il y avait des moments qui généralisaient.

 

GEN
Oui, c’est ça. À la fin, ça disait des choses intenses. Des fois, ça nous pèse. Mais, tu sais, Mélo est tellement… on est comme le Yin et le Yang. Mélo est dans la joie et le consensus, et moi je suis vraiment sanguine. Il faut que les gens sachent qu’il y a des marches anti-trans. Le nombre de personnes trans qui sont mortes cette année!

C’était une belle discussion qu’on a eue, à propos des coupures. Mais finalement, en parlant avec Sarah Berthiaume, on s’est dit que la force de Moi, Jeanne c’est que c’est doux, tu sais. C’est comme peut-être une invitation douce à réfléchir autrement.

 

ÉDITH
C’est intéressant parce que c’est sûr qu’il y a des gens qui n’vont pas le recevoir d’une façon douce, mais quand on est à l’intérieur de la lutte ou même quand on vit certaines réalités, j’imagine qu’on peut comprendre à quel point le discours pourrait être plus acide, plus pointu. Pour une part de la population, c’est déjà un choc. Bon après ça, on n’est pas en France, il n’y aura pas de choc du fait, je pense, qu’on utilise la figure de Jeanne d’Arc.

 

GEN
Il y a déjà quelqu’un qui a écrit un commentaire en dessous de l’article de Fugues.

 

MÉLO
Pour dire que Jeanne était résolument une femme. Parce que le verbatim a été pris de son procès.

 

ÉDITH
Oui, mais ces mots-là n’existaient pas. De toute façon, pour moi, l’objectif de la pièce ce n’est même pas de dire que Jeanne d’Arc était non binaire. Je n’pense pas que l’auteurice se targue de le savoir. La question, c’est plutôt : et si Jeanne d’Arc avait été non binaire? Et qu’on l’utilisait pour se raconter aujourd’hui. En tout cas, c’est ma perception.

Parlant du texte, c’est la première fois que vous vous attaquez à un texte contemporain déjà écrit. Là, au moment où on se parle, on est à deux semaines de la première. Est-ce qu’il y a des surprises par rapport à comment on s’attaque à une œuvre contemporaine, dans laquelle il y a aussi beaucoup de monde? C’est quoi les joies de ça, mais aussi les défis ?

 

MÉLO
Moi, ce qui me rend heureuse, c’est la chimie de l’équipe. C’est vraiment beau, les relations qui se sont installées, la confiance aussi. Iels ont plongé vite dans les affaires pis iels ont osé aller loin. Je suis contente qu’iels nous suivent.

 

GEN
Il reste deux semaines, oui. Nous, on travaille vraiment bien dans la pression. C’est quand on a beaucoup de pression qu’on devient le plus productives. Et je pense que là, pour les deux semaines qui restent, il faut juste crinquer le plaisir, le fun.

 

ÉDITH
Parce que c’est la beauté de ce show-là, et du fait que c’est vous qui le pilotez : c’est vraiment énergisant. Comme une bonne drogue.

 

GEN
Ouais, faut qu’on fasse oublier aux gens que ça dure 2 h 30 [incluant un entracte]!

 

MÉLO
Aussi, c’est la première fois qu’on n’est pas submergées par la paperasse, par la gestion.

 

GEN
Oui, c’est assez fou.

 

ÉDITH
C’est ça le grand objectif. C’est de vous libérer pour que vous soyez libres de créer.

 

GEN
Ce que ça nous fait réaliser de travailler à GO, c’est toute la charge mentale qu’on a quand on fait des shows, et que ça n’a pas de bon sens.

 

ÉDITH
Est-ce que vous sentez que ça fait une différence au niveau de l’espace de création?

 

GEN
C’est fou !

 

MÉLO
C’est aussi qu’on est exigeantes, c’est difficile de trouver l’équilibre.

 

ÉDITH
Ceci dit, le fait d’être à deux pour prendre les décisions, est-ce que vous sentez que ça multiplie votre liberté?

 

GEN
Oui. Il y a des gens qui diraient que ce n’est pas bon parce que tu fais des consensus. Mais on est comme une glue, on le sait quand l’autre…

 

MÉLO
Oui, et nos esthétiques se sont mélangées. Il y a eu un moment où c’était plus de tiraillements. Il fallait trouver l’espace de nos égos là-dedans.

 

ÉDITH
Maintenant, sentez-vous que vos deux esthétiques se sont entièrement fondues l’une dans l’autre?

 

GEN
Je trouve que c’est quand on écrit qu’on voit le plus nos différences. Dans le jeu, on se comprend, on s’entend. Moi, j’ai des images scéniques, l’espace, des idées, des pulsions. Mélo, c’est plus la finesse, le jeu.

 

MÉLO
Très fine, fine mouche.

 

GEN
Mais, des fois, Mélo a des idées vraiment flyées.

 

MÉLO
Il faut que je les fasse, que je les dise!

 

GEN
Mais c’est correct, ça me fait rire.

Tu parlais des défis de Moi, Jeanne. Moi, je trouve que le plus gros défi, pour nous, ça a été la quantité de gens. Parce qu’on est parties de se diriger nous-mêmes à diriger douze personnes. À essayer de comprendre comment iels fonctionnent. C’était comme un gros jump !

 

ÉDITH
En même temps, vous êtes des personnes de défis !

 

MÉLO
On aime ça !

 

ÉDITH
Ça aurait quand même été ennuyant de vous donner un show à trois. Qu’est-ce que vous auriez fait avec ça? Vous auriez trouvé ça plate, il fallait que vous ayez un petit peu peur. Mais qu’est-ce que vous allez faire après ça? Vous allez monter un show de Beyoncé ? Qu’est-ce qui va se passer?

 

MÉLO
Cirque du Soleil !!

 

ÉDITH
Watch out !

Quelques photos