Billetterie

Avoir l’étoffe nécessaire

l'amour ou rien

Retour à la pièce

« Les rythmes et les grooves musicaux noirs fonctionnent comme des formes de rébellion enthousiaste qui reconfigurent les logiques d’oppression et ouvrent vers une nouvelle conscience. »
 
– Sylvia Wynter, Black Metamorphosis

En m’approchant à pas feutrés de ce projet, mon intuition me disait qu’il était vain de traiter d’amour comme on traite un sujet. Il fallait en faire un objet, quelque chose de concret.
 
Plus que ça, il fallait le faire descendre de son piédestal, le dissoudre. Il fallait se le mettre dans le corps. Pas dans le corps désirant, charnel, commercial, sexuel. Mais dans le corps du vivant. Comme on dit dans le corps du texte.
 
C’est-à-dire, broder dans le tissu de nos humanités. À même les dommages, les incompétences, les inadéquations et les imperfections. Broder, dans tout ce que ça a de pas propre, de tout ce qui pue.
 
bell hooks parle de lovelessness. Un monde atrophié, en manque.
 
Toute sa vie de militance repose sur ça. Remettre en marche l’amour dans un monde sans amour. Un monde régi par les aveuglements volontaires, les injustices institutionnalisées et les violences internalisées. Les fondements d’une société malade.
 
Vu ainsi, le sujet de l’amour n’a plus la même teneur. Il ne s’agit plus d’une quête individuelle basée sur un sentiment qui nous tombe dessus, mais il s’agit d’une mise en marche collective, d’un projet commun qui nous oblige à regarder l’amour à travers les enjeux de la domination, de la suprématie, de la colonisation.
 
Ça devient imminemment politique. Je suis désolée de vous décevoir. Mais on ne s’en sortira pas. Il faudra dénouer ces nœuds avant de prétendre à quoi que ce soit.
 
C’est facile de lire all about love et de passer à côté de la critique sociale et de la charge raciale. Mais ce serait une occasion manquée de réfléchir aux multiples formes d’amour si on n’ancrait pas la quête d’amour dans un désir sous-terrain de révolution.
 
Ça sonne convenu dit comme ça. Mais c’est vrai.
 
Ceci dit, une fois le contexte évoqué et le décor planté, un essai théorique, ça ne fait pas nécessairement un bon objet scénique.
 
Il fallait que les mots se tiennent debout, que les gestes se déploient pour vous et que la musique enrobe tout. Et pour cela, il fallait un NOUS.
 
Ce spectacle existe dans l’improbable amalgame de toutes nos sensibilités.
 
NOUS sommes les particules d’un grand tout. Et c’est ensemble que nous avons tenté d’avoir l’étoffe nécessaire pour aimer.
 
Et si, lorsque vous poserez les yeux sur notre objet, il vous arrivait de vous laisser abattre par l’état de désarroi existentiel que le spectacle porte, ne vous laissez pas berner. Il y a aussi la jubilation, la jouissance, la puissance, le désir de se battre pour aimer. C’est partout, dans le sous-texte, dans le sous-geste, dans les coulisses, en filigrane, en arrière-plan, dans les brèches, dans les silences et dans les beats assourdissants.
 
Elle est là, la chose.

 
 

Remerciements

Toute ma gratitude à Olivier Arteau d’avoir fait germer l’idée en moi. Et merci infini à Édith Patenaude pour le coup de pied au cul supplémentaire pour faire arriver cette affaire. Merci à vous deux mes ami·es et merci à vos équipes respectives de faire avancer la barque.
 
Merci à toute l’équipe de MAYDAY de me suivre dans les projets les plus flous et les plus fous.
 
Merci à Vlad pour le courage de construire ta présence sur mes fondations en ruine.
 
Merci à Rachel pour tes gestes toujours à réinventer.
 
Merci à Ariel pour le grand éclat et le grand écart de ta présence.
 
Merci à Carla de faire tomber le voile tranquillement.
 
Merci à Mimo pour le spectre de tes possibilités.
 
Merci à Fabien pour ta générosité d’être et pour ton corps battant.
 
Merci à Laurie d’être le cœur battant.
 
Merci à Frannie Holder d’être la cheffe de chœur. Et surtout merci pour cette fanfare tragique que tu as conçue. Chaque fois je suis émue.
 
Merci à Angélique Willkie et Anne-Marie Jourdenais pour vos regards macros et micros. Je n’y arriverais pas sans vous.
 
Merci à Lorrie Jean-Louis pour ta pensée touffue et tes mots en forme de machette.
 
Merci Paul Chambers (et Kareen) pour tes lumières literaly out of this world.
 
Merci Vano Hotton de nous faire marcher sur un tapis doré.
 
Merci à Elen Ewing (Amélie et Pascale aussi) pour ces paillettes qui forment le tissu de notre quête. Retrouver notre brillance.
 
Merci Ange Blédja Kouassi pour ces éclats de beauté.
 
Merci à Suzanne Crocker pour ton ardeur et ta rigueur.
 
Merci à Benoît Bouchard de faire rocker ça ce show-là.
 
Merci à Alex Gendron pour ton ingéniosité.
 
Merci Marie-Ève Pelletier pour la mise en bouche.
 
Merci à Jeanne et Julia de nous habiller.
 
Merci à toutes ces personnes de l’ombre avec qui nous partageons les applaudissements aussi.
 
Et merci à mon fils Milo de m’offrir la liberté d’être une mère et d’être une artiste. C’est avec lui que je me pratique à aimer.
 
 

Mélanie Demers
Metteuse en scène et chorégraphe