LES AUTEURS ET AUTRICES
Normand Canac-Marquis + Evelyne de la Chenelière + Marie-Eve Gagnon + François Létourneau
Qu’est-ce qui vous a plu dans le projet?
Evelyne
« La surprise du thème et du projet en soi. Je me disais : c’est un piège, intrigant, allumant, bien tourné, un sujet qui a un a priori, ah! C’est intéressant! »
François
« L’inconnu, les rencontres. Le thème m’inspirait. Le côté immédiat de l’aventure me plaisait. »
Marie-Eve
« Le titre : une question que je me pose depuis longtemps, à laquelle j’aurais aimé répondre dans un spectacle. Que d’autres auteurs soient sollicités, que je ne connaissais pas, ajoute du
piment. J’aime les jeux, le mystère, ça tombait dans mes goûts. »
Normand
« C’est une excellente question qu’on n’ose pas poser, en lien avec la presque totalité des problèmes mondiaux, des guerres que nous vivons. La sexualité étant liée à l’instinct de survie, donc au territoire. Sous une apparence folichonne, cette question renferme des contenus extraordinairement importants. »
Qu’est-ce qui vous étonne le plus dans le texte des autres?
François
« La qualité de l’écriture, la subtilité, que les textes soient si différents mais se rejoignent. Et un fond d’humour qui les traverse tous : une légèreté dans la gravité. »
Evelyne
« Écrire, c’est comme un parcours où on tente d’éviter des pièges. Personne n’est tombé dans les pièges que j’avais pressentis. J’ai trouvé ça généreux, compromettant, étonnant. »
Marie-Eve
« Tout de suite, j’ai vu des corps dans l’espace pour chaque texte, je me suis dit : c’est bon signe, c’est incarné. »
François
« Ça fait du bien aussi… quand on parle sexualité, il faut toujours que ce soit le fun. »
Marie-Eve
« L’orgasme à tous les jours! »
François
« C’est ça. Et les textes expriment bien que la sexualité, c’est compliqué. C’est une hypocrisie de notre époque, le salut par le sexe. »
Marie-Eve
« Ça fait partie, avec la carte de crédit, de ce qu’on doit posséder : une vie sexuelle en santé. »
Evelyne
« Ça rend beaucoup de gens malheureux, cette pression, cette légende. »
Normand
« Je n’ai pas lu les textes des autres. Je me garde le plaisir de les découvrir en même temps que le public. »
Est-ce que c’est une question de filles?
François
« C’est un peu une question de filles, mais c’est intéressant que ce ne soit pas juste des gars qui répondent : ça concerne autant les filles que les gars. »
Marie-Eve
« C’est une question de filles, comme il y a des collèges de garçons ou de filles. C’est une fille qui l’a posée, mais tout le monde peut se l’approprier. L’a priori, le cliché, c’est que les femmes se font tirer l’oreille et que les hommes sont toujours prêts. »
Evelyne
« Ce n’est pas une question de filles exclusivement. Le questionnement est devenu plus vicieux et plus douloureux. On ne s’interroge pas sur la performance, mais sur l’envie perpétuelle de sexualité. C’est quoi le désir? Est-ce inépuisable? »
Normand : On vit dans une société de séduction totalement absurde. C’est pour ça que j’ai écrit une farce. Derrière ce beau thème de comédie se cachent des drames épouvantables, des tragédies effrayantes. Qui concernent hommes et femmes. »
Y a-t-il une réponse à cette question?
Evelyne
« La question sous-entend que les hommes en parlent, qu’il y a cette verbalisation. On ne peut pas y répondre, car elle ouvre sur d’autres questions : ah bon!, tous les hommes disent ça? Et les femmes, non? On parle de la panne de désir, attribuée aux femmes, mais les hommes, ça ne leur arrive pas? »
François
« Parler du sexe comme quelque chose qui existe en soi, le sexe, il y a quelque chose de faux là-dedans. C’est ce que représente Whitney dans ma pièce : le sexe extirpé des relations humaines. Mais ça n’existe pas. Ce qui existe, c’est le désir. »
Marie-Eve
« C’est le fun de se poser la question, mais la réponse, on s’en fout! »
Evelyne
« C’est comme le plus grand secret qui unisse deux êtres, le sexe, c’est insondable. On aura beau en parler, en parler… »
Marie-Eve
« C’est dans l’action que ça se révèle… (rires) »
Normand
« Oui, il y a une réponse à la question. Je me mouille : les hommes aiment beaucoup moins le sexe qu’ils le disent. Ce qui les repaît, c’est la conquête. À partir du moment où j’ai gagné le territoire et conquis la femelle – pour parler en termes de bêtes –, il y a un sentiment de sécurité apaisant. Sa jouissance est là. Mais le sexe comme tel, je crois sincèrement que l’Occidental manque trop de poésie pour en jouir vraiment. Je ne me ferai pas d’amis en disant ça… »
Propos recueillis par Raymond Bertin
Entretien avec les auteurs et autrices
Les hommes aiment-ils le sexe, vraiment, autant qu'ils le disent?